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Page:Sacher-Masoch - Sascha et Saschka (suivi de) La Mère de Dieu, 1886.djvu/12

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SASCHA ET SASCHKA.

autel à travers la foule qui se pressait dans l’église. Tout à coup un ecclésiastique, chargé de maintenir l’ordre, le saisit au collet et s’écria :

« Que viens-tu faire ici ? Voudrais-tu par hasard devenir évêque ? »

La parole magique, mystérieuse était prononcée. Une étrange soif d’honneurs s’était emparée de Sascha. La crosse, tel était le but vers lequel il tendit presque à son insu. Et dès ce moment les oiseaux purent construire paisiblement leurs nids, et les grillons n’eurent plus à craindre d’être troublés dans leurs chants. Plus tard le jeune garçon se rendit compte du mobile qui le faisait agir et qui le dominait. Le but qu’il voulait atteindre imprima à l’adolescent un cachet particulier.

Sascha devint par la suite un grand théologien. Il avait réfléchi ; et il savait que pour parvenir à ce qu’il ambitionnait, il fallait renoncer à bien plus d’autres choses encore qu’à un cheval de bois ou à un nid d’oiseaux. Pour lui ne devait briller aucune étoile, pour lui ne devait s’épanouir ni fleur ni jeune fille ; jamais dans l’avenir il ne devait presser dans ses bras une jeune bien-aimée, ni prêter l’oreille aux premiers bégaiements d’un enfant[1]. Et comme le cœur de Sascha, comme tous les cœurs d’hommes bons et simples, aspirait à l’amour, c’est uniquement sur sa patrie que ses affections se reportèrent avec toute leur ardeur, leur vivacité et leur enthousiasme.

Ces deux sentiments s’allièrent chez lui, et comme

  1. Les prêtres de l’Église catholique grecque qui aspirent à l’épiscopat doivent garder le célibat.