Page:Sacher-Masoch - Sascha et Saschka (suivi de) La Mère de Dieu, 1886.djvu/175

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
166
LA MÈRE DE DIEU.

on n’entendait que les coups alternés des batteurs en grange, un bruit confus et grandissant montait. On s’appelait. Il y avait un cliquetis de faux, comme lors de la Révolution. Des chevaux hennissaient, des chiens aboyaient. Enfin, les cloches se mirent à sonner, pesamment.

Un paysan de Brebaki avait apporté de mauvaises nouvelles. Depuis des années, depuis l’abolition du robot, il y avait querelle entre les anciens seigneurs et les paysans de Fargowiza-polna. On avait, en 1848, réellement promis à ces derniers la donation de leurs chaumières et de leurs terres ; mais les seigneurs avaient gardé pour eux les pâturages et les forêts.

Les paysans, qui se trouvaient ainsi sans fourrage pour leur bétail et sans bois à brûler, n’hésitèrent pas longtemps. Ils se servirent des bois et des pâturages, tout comme au temps du robot. De là, des querelles incessantes. On leur démontra qu’ils avaient tort. On les arrêta, on les condamna. Rien ne servit. Les choses en vinrent au point qu’une véritable guerre éclata entre les villages et les seigneuries.

Le district de Fargowiza-polna dut mettre des gens sur pied et les envoyer pour maintenir les rebelles.

À cette nouvelle éclata un nouveau tumulte. Les paysans se rassemblèrent, décidés à une résistance terrible. Ils n’écoutèrent ni les conseils du wujt[1], ni les avertissements de leur curé. Ils s’armèrent de faux, de fléaux et de fusils, et sonnèrent le tocsin

  1. Juge de district.