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LA MÈRE DE DIEU.

Elle se leva, lente et majestueuse, drapée dans sa pelisse noire, qui lui tombait jusqu’aux pieds. Les sequins d’or qui ornaient sa poitrine scintillaient avec un cliquetis.

Elle étendit le bras.

« À genoux, pécheur !

— Je ne m’agenouillerai pas devant toi. »

Mardona le regarda avec plus de pitié que de colère.

« Tu t’agenouilleras devant moi cependant, reprit-elle avec une sûreté qui le troubla, quoique d’une voix très douce.

— Tu essayeras en vain de m’y obliger. Je ne te crains pas.

— Ton devoir est de me craindre, Sabadil, répondit-elle affectueusement. Tu dois craindre Dieu que je représente. La crainte de Dieu est le commencement de la sagesse. »

Elle s’approcha de lui, posa sa main sur son épaule, et le regarda dans les yeux, longuement, avec amour. Et il y avait beaucoup de choses dans ce regard. Il y avait surtout de la tristesse, une tristesse amère.

« Veux-tu nier que tu gis dans les ténèbres, et que tu as besoin de la lumière ?

— Ces ténèbres, c’est toi qui m’y as conduit.

— Non. Ce n’est pas moi. Ce sont tes doutes, mon pauvre ami. Tu ne possèdes pas la vraie foi. Tu donnes trop de prix aux jouissances terrestres. Aussi Satan a-t-il un plein pouvoir sur toi. La jalousie, l’envie, la passion et l’orgueil t’ont aveuglé. Tu as