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MARQUIS DE SADE — 1776
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la porte, l’assurant toujours que j’allais rendre à M. le grand-maître, positivement, tout ce qu’il me disait… Tu crois bien que je n’y ai pas manqué !

« Qu’est-ce que c’est que ce polisson-là, m’a dit le grand-maître, quand je lui [eus] remis la lettre et rendu le détail du cas qu’en avait fait M. Béranger ? Je m’en vais lui parler ce matin à la cour et lui apprendre à vivre ! Il lui a si bien parlé que le résultat a été une visite à moi du Béranger pour me dire qu’il était à mes ordres et qu’il prendrait le jour que je voudrais, mais je n’ai pas voulu recevoir sa visite et j’ai dit à son laquais, qui était monté dans mon appartement pour savoir si j’y étais : « Dites à votre maître, monsieur, que je n’y suis pas et que j’irai le chercher pour me conduire à la cour le premier jour que le roi ne chassera pas. » Je serai présenté en uniforme.

Que d’inconvénient à ne se pas laisser présenter (après tous les propos) : un refus formel aurait éclairé ! J’ai toujours à dire, quel[que] malheur qu’il arrive, que je ne le voulais pas et qu’on m’y a forcé. Je te prie de reprendre tout l’article de ma dernière lettre où il est question de cela, de le joindre avec l’article où il en est question dans celle-ci, de tout lire à l’avocat et de le prier de me mander ce qu’il aurait fait à ma place et quel conseil pour les suites en cas d’accident. Car je suis ici abandonné à moi-même sans personne avec qui je puisse raisonner de mes affaires, livré à une bête brute. (C’est André). Cette position est affreuse et je donne bien ma parole d’honneur de ne plus m’embarquer ainsi. Je me meurs de peur de faire une sottise dans cette présentation ; je me suis laissé entraîner et forcer par des gens qui ne savent pas le fond des choses et je n’aurais pas dû être si faible. Mandez-moi au moins, avec l’avocat, ce que vous pensez de cette démarche et quelle conduite il faut que je tienne si l’on vient à me reconnaître et à me tancer. Combinez tous deux et conseillez-moi, je vous conjure. Qu’il est cruel d’être dans la position où je suis et d’être abandonné !


Lions a vu Nanon qui demande des nouvelles de sa fille et se flatte d’intéresser l’évêque à sa cause. (Le 25 février 1776).

……Je vis, le vingt-trois, Nanon. Elle paraît être assez tranquille. Elle m’a chargé de vous prier de lui donner des nouvelles de sa fille et ce qu’elle est devenue. Elle se flatte que monseigneur Dulaud, notre prélat, allant faire sa visite à la communauté religieuse, s’informera des personnes détenues dans le refuge, qu’il sera question d’elle et que ce seigneur pourrait s’intéresser pour la faire sortir. Je le crois trop prudent pour vouloir s’en mêler……


La marquise apprend que la petite de Caderousse s’est enfuie du couvent. « Ce 15 mars 1776 ».

……J’apprends que la petite de Caderousse est partie pour Lyon il y a huit jours. Ne pourriez-vous pas écrire à l’abbesse, comme chargé par