Page:Sade, Bourdin - Correspondance inédite du marquis de Sade, 1929.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— XVII —


teur de police Marais, que nous retrouverons, écrit, dans un rapport du sept décembre 1764 : « J’ai fort recommandé à la Brissaut, sans m’expliquer davantage, de ne pas lui donner de filles pour aller avec lui en petites maisons ». Les femmes le craignaient. Il ne put, selon le même Marais, décider mademoiselle Rivière, de l’Opéra, à venir le joindre à Arcueil.

Sade eut pourtant une liaison durable avec la danseuse Beauvoisin. Ses biographes content qu’il l’avait amenée à la Coste où il la fit passer pour sa femme. Il y invitait la noblesse des environs à des fêtes et à des représentations théâtrales pour lesquelles il eut toujours un goût très vif. Il était cabotin né et sa séduction est comme le fard qu’il faut à la rampe. La Beauvoisin y fut prise, car voici comme il en usa avec elle. Le vingt et un août 1765, maître Pontelier, notaire royal, et son collègue, minutaient un contrat par lequel le marquis s’engageait à faire à sa maîtresse une rente perpétuelle de cinq cents livres en échange de la somme de dix mille livres qu’elle lui compta, devant eux, en écus de six et de trois. La demoiselle Beauvoisin déclare dans cet acte que la somme payée par elle provenait, jusqu’à concurrence de huit mille six cents livres, de la vente qu’elle avait consentie la veille à un sieur Le Coq, marchand bijoutier, quai de l’Horloge-du-Palais, d’une paire de girandoles à corbeilles, plus un héron, un bracelet, un croissant et une croix, et, pour le surplus, de celle d’autres bijoux à son usage « lesquelles ventes elle a fait dans la vüe de la présente constitution ». Il n’est question nulle part que la pension ait été payée.

Il est, au demeurant, certain que le marquis a passé à Paris la plus grande partie des années qui ont suivi sa première sortie de prison. Il y est imposé à dix-huit livres, pour la capitation de ses domestiques, au bureau du Palais-Royal ; il paie, le vingt-quatre novembre 1765, cent cinquante livres pour trois quartiers d’un petit appartement situé à Versailles, rue Satory, qu’il semble avoir conservé l’année suivante ; le deux janvier 1766, il débourse trente-six livres pour le loyer d’une écurie avec remise à Paris ; le six juillet soixante livres pour le louage d’un cabriolet « livré en bon état ». Le quatre novembre, un sieur de Lestarjette reçoit deux cents livres pour quatre mois et demi de loyer, « qui échoiront à Pasques prochain », d’une maison toute meublée, sise à Arcueil, qu’il tient lui-même à bail d’un sieur Galber. C’est la maison que l’affaire Keller a rendue célèbre. Ce bail est continué, le premier février 1768, par le sieur Galber en personne, pour un loyer annuel de