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MARQUIS DE SADE — 1790
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sera-t-il plus saint, revêtu de formes plus augustes que prononcé au milieu des représentants de la nation ? Toutes ces chicaneries-là viennent du parti Orléanais qui n’a d’autre désir que la guerre civile. Nous sommes perdus s’il triomphe……


Le marquis a été volé par la faute de Langlois et fait un beau projet pour qu’il n’en coûte rien à Langlois ni, surtout, à lui-même. (Sans date).

Le malheur qui vient de m’arriver, mon cher avocat, ne me permet pas de m’occuper d’autre chose dans ce moment-ci. Je viens d’être volé de tout ce que je possédais d’argent. J’économisais, je faisais tout au monde pour atteindre le bout de l’année ; j’y aurais infailliblement réussi sans cet affreux accident. Il me restait quinze cents livres qui, avec les deux mille que vous alliez m’envoyer me finissaient au mieux mon année. Un scélérat, par l’action la plus noire et la mieux combinée, pénètre dans ma chambre et me prend absolument tout. Il m’a laissé avec six livres. M. Reinaud, qui veut bien se charger de celle-ci pour vous, a vu les lieux. Il vous parlera sans doute de ce funeste événement. Venons sans nul délai aux moyens de le réparer……

Le sujet qui m’a volé était un présent de Langlois qui doit maintenant vous être arrivé. J’ai fait cent écus de pension à Langlois ; il faut pendant cinq ans que cette pension lui soit supprimée pour le punir……

Voici maintenant la manière de faire vivre Langlois cinq ans sans pension.

Depuis ma liberté, madame de Villeneuve me témoigne beaucoup d’intérêt et de sensibilité. Langlois a pu me donner un coquin, mais Langlois, tel coupable qu’il soit sur cet objet, n’est cependant point un coquin. Je désire donc, et je supplie, par la lettre suivante, madame de Villeneuve de vouloir bien me rendre l’extrême service de prendre Langlois chez elle pendant les cinq années en question, de le loger, nourrir, etc. Je lui donne ma parole, à la fin de la cinquième année, de la délivrer de ce fardeau, mais elle me rendra un service essentiel de s’en charger pendant cet intervalle. Ici je pressens l’objection : madame de Villeneuve, sachant peut-être que j’ai à me plaindre de ce Langlois, répugnera à le garder chez elle, quelle que puisse être d’ailleurs sa bonne volonté sur cet objet. Mais il est bon qu’elle sache à cet égard que, si je punis Langlois de m’avoir donné un mauvais sujet, je ne le punis d’aucune mauvaise action ; que ce Langlois imprudent n’est cependant ni un coquin ni un scélérat ; que je lui en réponds corps pour corps, et que la seule précaution qu’il y ait à prendre avec lui est de ne pas prendre de domestique de sa main. Elle ne court donc aucun risque à me rendre ce service et je la supplie instamment de me le rendre. Cela est d’autant plus essentiel que c’est la seule façon qui puisse me faire retrouver mes quinze cents livres, somme perdue pour moi par l’imprudence