Page:Sade, Bourdin - Correspondance inédite du marquis de Sade, 1929.djvu/481

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
MARQUIS DE SADE — AN VI.
417


Le marquis et « Sensible » sont encore pleins des souvenirs de Provence. (26 brumaire).

……Je ne reçois de nouvelles de personne ; je crois que la route de Provence n’existe plus ; je l’ai pourtant laissée très belle. Je me console avec Sensible en disant de vous « Il nous aime ; il ne nous abandonnera pas et s’il n’écrit point c’est qu’il agit. »

Sensible et moi nous vous suivons partout, nous vous voyons dans votre cabinet, descendre au salon, aller à la campagne et nous résumons de là qu’il est charmant d’avoir vu ses amis chez eux. On se les représente avec plus de plaisir ; on les suit avec plus d’intérêt.

Nous vous embrassons tous deux de bien bon cœur, ainsi que votre aimable et respectable famille. Je vous désirais hier à dîner. Caché dans un petit coin, vous auriez vu avec quelle âme, avec quelle sensibilité, elle voulait marier mademoiselle Benoîte avec un homme qui dînait avec nous et qu’elle croyait lui convenir ; mais, comme je ne suis pas du même avis, attendu que je ne crois pas que cet homme lui convienne, je n’appuyais pas la motion ; mais la bonne Sensible aime bien ses amis, voilà ce qu’on peut bien affirmer……


Le comte de Sade, fils aîné du marquis, remercie l’avocat d’avoir empêché son père de faire un mauvais marché. (Paris, ce 15 frimaire, an VI)*.

……Mon pere m’a dit qu’on avait retrouvé son nom sur une liste des emigrés. Cela est bien mechant il n’aura pas de peine a faire effacer cela ; quoiqu’on ne puisse pas confondre le nom du pere et celui du fils cependant pour eviter absolument toute espece d’equivoque qu’elle qu’elle puisse être marquez moi si vous auriez besoin de mes certificats de non-emigration sur la liste de mon departement et sur celle generale de tous les departements je les ai ici tout pret, tous les 2, ainsi que mes certificat de residence s’il en etait besoin.

J’ai reçu quelques nouvelles de votre pays depuis mon retour ici on m’a ecrit que vous aviez empeché mon pere de faire un mauvais marché, sans me dire ce que c’etoit, je n’imagine pas que ce soit pour une vente puisqu’il ne peut pas vendre, mais quelque chose que ce soit c’est une obligation de plus que vous a la famille et lui meme le premier……


Le marquis apitoie l’avocat sur le sort de Sensible.

……Nous laisserez-vous encore longtemps manger de la salade à l’huile d’œillet, et Sensible, la pauvre Sensible qui vous aime tant, souper avec un verre d’eau au sucre, la pauvre Sensible qui, en allant hier à la police par un temps épouvantable disait : « C’est parce que M. Gaufridy s’inquiète et se tracasse de cette affaire que j’y vais, au moins ; ce n’est pas pour