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CORRESPONDANCE INÉDITE DU


chose de charmant, mais de bien sophistique : « Tout ce qui vous appartient sera toujours bien reçu chez moi. » Si Dragon devenait enragé, je doute pourtant que vous le reçussiez bien, et certes vous auriez grande raison de le tuer alors. Où les procédés n’existent plus, le sang n’est rien, et si mon bras se gangrenait, je le ferais couper demain. Vous êtes bien bon d’avoir cru à ses offres de service, il ne connaît pas un chat à Paris. S’il s’agissait de l’armée de Condé, oh ! cela serait différent ! J’ignore ce qu’il a fait avec madame Quesnet sur votre affaire de François, mais je crois que celle-ci a agi. Je la vois si peu. Elle vient ce soir nous visiter ; je ne manquerai pas de lui en parler. Soyez sûr qu’elle vous est bien attachée……


Le marquis gagne quarante sols par jour au spectacle de Versailles et demande à François Gaufridy de le tirer de cet état d’abjection. (25 pluviôse, an VII).

……Notre ménage est rompu depuis le dix septembre dernier ; madame Quesnet vit comme elle peut chez des amis et moi, employé au spectacle de Versailles, je gagne quarante sols par jour tant que cela peut s’étendre et sur cela je nourris et élève l’enfant, ce qui certes est bien peu de choses en dédommagement des peines, soins et dépenses que fait la malheureuse mère en courant tous les jours à pied par une saison horrible, et pour apaiser les créanciers, et pour obtenir la radiation. En vérité, cette femme est un ange que le ciel m’a envoyé pour que [je] ne sois pas tout à fait absorbé par les fléaux lancés contre moi par mes ennemis. Vous seul et votre père nous tirerez de cet état d’abjection……


Le marquis est vivement attaqué sur sa moralité par un ayant-cause de M. de Murs, son créancier. (10 germinal).

……Un M. Bolli de Grenoble se disant successeur de la rente que je supportais à M. de Murs, vient de faire un tapage infernal à Paris contre moi et dont rien ne peut exprimer, et la force, et le mauvais effet. Il a attaqué le commissaire du directoire de mon canton, mon ami, l’a forcé à embrasser sa cause ; sur le refus de celui-ci, il a attaqué le juge de paix et définitivement moi, par qui il aurait dû commencer. En substance voici les propos de son ambassadeur :

« On sait que Moïse est en règle et qu’il n’a jamais émigré, mais ce n’est pas sur cela que jugera le directoire, c’est sur sa moralité. Moïse est un homme immoral, donc il sera maintenu, et, d’après cela, Bolla[1] mon client, veut se mettre en règle. »

  1. Le marquis a bien écrit une fois « Bolli » et l’autre fois « Bolla ».