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Page:Sade, Bourdin - Correspondance inédite du marquis de Sade, 1929.djvu/76

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CORRESPONDANCE INÉDITE DU


accablée, et, si son honneur et les égards dûs à son rang et à son sexe outragé la portent à repousser la cruauté des insultes qu’elle essuie, son respect arrête les effets de son ressentiment. Elle répond que son mari est absent. Ce mot est le signal du plus affreux déchaînement. Cette troupe se divise ; l’une garde les avenues du château, l’autre se distribue pour fouiller dans tous les coins et recoins, les armes à la main, et prête à tout enfoncer à la moindre résistance ; les instruments en avaient été préparés, l’on voyait même, entre les mains de l’un des archers, une barre de fer forgée à Bonnieux[1] pour enfoncer portes et meubles.

L’inutilité des recherches redouble la fureur ; le cabinet du marquis de Sade est l’objet de la dernière scène ; l’on arrache et l’on coupe des tableaux de famille ; l’exempt de police surtout se signale par l’enfoncement des bureaux et des armoires de ce cabinet ; il se saisit de tous les papiers et de toutes les lettres qu’il y trouve. Les uns, au gré de cet exempt, deviennent la proie des flammes ; il en sépare d’autres qu’il emporte, sans donner à la suppliante la moindre connaissance de ce qu’ils contenaient, sans en laisser le moindre état……

Cet homme pousse la témérité jusqu’à arracher de force des mains de la suppliante le papier le plus indifférent, à enlever une tabatière d’écaille garnie en or sur laquelle se trouvait un portrait en miniature, et, secondé par la troupe à ses ordres, il n’est sorte d’hostilités qu’ils ne commettent, il n’est sorte d’infamies qu’ils ne déclament contre la personne du marquis de Sade. C’est par des traits pareils que cet exempt alimentait sa fureur et celle de sa troupe, et si l’horreur de cette conduite, comme une étincelle que le moment voit naître et se dissiper, se présentait à ses yeux, le remords en était bientôt écarté par la force des ordres de la dame de Montreuil ; il ne faisait, disait-il, que les exécuter. Mais ce que l’on aura peine à croire, c’est que l’on a entendu quelques-uns de sa troupe pousser la barbarie jusqu’à vomir qu’ils avaient ordre de tirer chacun trois coups de pistolet sur le marquis de Sade et de porter ensuite son cadavre à la dame de Montreuil. Il y en a eu même qui, craignant avec raison que toutes ces horreurs n’excitassent quelque émeute de la part des habitants de la Coste dont l’attachement, mérité par leur seigneur[2]


Madame de Sade veut surveiller les progrès du jeune fils de Gaufridy.*

…Vous voudré bien donner a André une main de papier avec des plume pour quil aprene a écrire et lui dir que cant son papier cera remplie il me la portera pour que je voye les progrès ce vendredy 29 avrille 1774.

Voici une petite serure a faire acomoder le bouton.

  1. Village voisin de la Coste. La Coste était en Provence ; Bonnieux, bien que plus éloigné d’Avignon, faisait partie du Comtat.
  2. La suite manque ou l’avocat est à bout de souffle.