Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/193

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systême m’a paru bien philosophique pour eux.

Mais cette étincelle de raison est bientôt étouffée par des extravagances pitoyables : ils disent que la mort n’est qu’un sommeil, au bout duquel ils se trouveront tout entiers et tels qu’ils étaient dans ce monde, sur les bords d’un fleuve charmant, où tout concourra à leurs desirs, où ils auront des femmes blanches et des poissons en abondance. Ils ouvrent ce séjour fabuleux également aux bons comme aux méchans, parce qu’il est égal, selon eux, d’être l’un ou l’autre ; que rien ne dépend d’eux qu’ils ne se sont pas faits, et que l’Être qui a tout créé ne peut les punir d’avoir agi suivant ses vues… Singulière manie des hommes, de ne pouvoir presque dans aucune de leurs associations se passer de l’idée absurde d’une vie à venir ; il est bien singulier qu’il leur faille les plus puissans secours de l’étude et de la réflexion pour réussir à absorber en eux une chimère née de l’orgueil, aussi ridicule à admettre, et aussi cruelle-