Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/200

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hasard m’y fit jamais rencontrer Léonore, n’aimant qu’elle, ne pensant qu’à elle, lorsque le sort, pour calmer un instant mes maux, fit naître au moins pour moi, l’occasion d’une bonne œuvre.

J’étais sorti seul un matin pour aller rêver plus à l’aise à l’objet de mon cœur ; je préférais ces promenades solitaires à celles où Sarmiento m’empestait de sa morale erronée, et cherchait toujours à combattre ou à pervertir mes principes, lorsque je découvris un spectacle fait pour arracher les pleurs de tous autres individus que ceux de ce peuple féroce, peu faits pour le plaisir touchant de s’attendrir sur les douleurs d’un sexe délicat et doux, que le ciel forma pour partager nos maux, pour mêler de roses les épines de la vie, et non pour être méprisées et traitées comme des bêtes de somme.

Une de ces malheureuses hersait un champ où son mari voulait semer du maïs, atelée à une charrue lourde ; elle la traînait de toutes ses forces sur une terre grasse et