Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 2, 1795.djvu/54

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l’en arracher… Oh ! Monsieur, que me dites-vous ? peut-être aimerai-je mieux l’incertitude. — Choisissez. — Agissez, Monsieur, puisque vous voulez bien vous intéresser à mes malheurs ; agissez : et si le Sultan possède Léonore, s’il se refuse à me la rendre, j’irai mourir de douleur aux pieds des murs de son serrail ; vous lui ferez savoir ce que lui coûte sa conquête ; vous lui direz qu’il ne l’achète qu’aux dépends de la vie d’un infortuné.

Le comte me serra la main, partagea ma douleur, la respecta et la servit, bien différent en cela de ces ministres ordinaires, qui, tout bouffis d’une vaine gloire, accordent à peine à un homme le tems de peindre ses malheurs, le repoussent avec dureté, et comptent au rang de leurs momens perdus ceux que la bienséance les oblige à prêter l’oreille aux malheureux.

Gens en place, voilà votre portrait : vous croyez nous en imposer en alléguant sans cesse une multitude d’affaires, pour prouver l’impossibilité de vous voir et de vous