Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 3, 1795.djvu/27

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s’est rejetée une seconde fois dans les bras de Léonore, tout s’est éclairci, j’ai produit d’un côté la lettre du chevalier de Meilcourt, de l’autre les dépositions du pré Saint-Gervais, et toutes ces pièces s’enchaînant, se prêtant mutuellement des forces, il est devenu impossible à Claire de Blamont, à qui nous conservons le nom de Léonore pour l’intelligence de cette histoire, il lui est devenu impossible, dis-je, de pouvoir plus long-tems s’aveugler sur sa naissance… Et voilà donc pourquoi j’étais haïe de madame de Kerneuil, a dit cette jeune personne, en se jettant aux pieds de sa véritable mère ; voilà donc pourquoi on me détestait. Oh ! madame, a-t-elle continué, mais avec plus de manière que de véritable sentiment : (c’est un trait de son caractère qu’il ne faut pas perdre de vue) ! oh, madame, laissez-moi vous demander à genoux des sentimens que mon malheureux sort ne m’a jamais permis de connaître ; mon ame était faite pour les sentir, et la plus barbare des femmes lui en