Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 3, 1795.djvu/462

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Oh ciel ! me dis-je dès que je fus un peu calme, serait-ce donc ici le tombeau de cette fidélité qui m’est si chère, et que je conserve avec tant de plaisir ? J’ai échappée aux pièges d’un noble Vénitien, un corsaire barbare n’a osé attenter à ma pudeur, elle n’a point cédé aux poursuites d’un consul français, à la veille d’être empalée à Sennar, ne sauvant ma vie qu’au prix de mon honneur, j’ai trouvé le secret de garder l’un et l’autre, j’ai vu un Empereur cannibale à mes genoux, je suis sortie intacte des mains d’un jeune Portugais, d’un vieux Alcaïde de Lisbonne, des quatre plus grands débauchés de cette ville, dom Flascos de Benda-Molla n’a pu triompher de mes rigueurs ; une bohémienne, deux moines et un chef de brigand, ont soupiré sans fruit. Et tout cela serait-il, grand Dieu, pour devenir la proie d’un inquisiteur … Hélas ! j’avais des ressources par-tout, il ne m’en reste aucune ici, il faut que je périsse ou que Dieu fasse un miracle en ma faveur,