si elle est innocente, que de l’irriter par des
soupçons. Cette manière de voir ne me paraît pas
juste : car, vos démarches la prouvant innocente,
comment dès lors peut-elle se fâcher de ce qui la
rend si digne de moi. Et, en ayant l’air de craindre
vivement ce que vous établissiez dans le second
cas, vous me prouvez que cette hypothèse-là,
seule, est vraisemblable pour vous.
— Ah ! mon prince, comme la jalousie saisit rapidement tout ce qui sert à la nourrir ! Pleinement rassuré par les vertus de votre épouse, ne cherchez que dans son cœur tous les moyens de vous calmer ; cela suffit à votre tranquillité.
— Soit, dit Frédéric : mais ce que je vous propose établit encore mieux cette tranquillité, et j’exige très décidément que vous fassiez ce que je vous ordonne.
— J’obéirai, mon prince, répondit Mersbourg en prenant congé ; mais si la vérité me contraignait à vous affliger, daignez, je vous en conjure, vous rappeler vos ordres.
La situation dans laquelle se trouvait Mersbourg n’eût été pénible que pour un honnête homme ; mais avec le caractère que nous commençons à démêler en lui, elle ne pouvait être que très agréable. Il devenait, en quelque façon, l’arbitre de toutes les chances et pouvait, avec la souplesse