Aller au contenu

Page:Sade - Cahiers personnels, Adélaïde de Brunswick, Pauvert, 1966.djvu/298

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
278
ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

— Pourquoi pas ? dit le geôlier. Du moment que nous vous avons volées, vous devenez nécessairement nos victimes. Il faut bien se défaire de vous : vous tairiez-vous, si nous vous rendions la liberté ?

— Ce calcul est infâme, reprit Adélaïde. Est-ce donc une raison de se permettre un grand crime, seulement parce qu’on vient de s’en permettre un moins fort ?

— Oh ! nous ne raisonnons pas, nous autres ! nous agissons. Allons, allons ! tranquillisez-vous, ce ne sera pas long, vous dis-je ; je ne vous apporterai pas encore trois dîners.

Et l’infâme sortit, laissant l’âme de la malheureuse princesse glacée de crainte et de terreur.

Adélaïde ne tarda pas à rendre compte à sa chère compagne de ce qu’elle venait d’apprendre. Ayant également questionné son geôlier, Bathilde avait reçu à peu près les mêmes réponses.

— Eh bien, dit Adélaïde, crois-tu maintenant que nous ferions mal d’user de nos dernières ressources ?

— Le danger est le même, madame, mais nous avons à présent une raison de plus pour mettre nos moyens en usage : je vous promets de me charger demain de cette tentative.

Bathilde tint parole. Le geôlier accepta ; mais,