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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

— Mais, dit le comte, si Frédéric vous préparait encore des fers ?

— Je m’y soustrairais comme je l’ai déjà fait… Vous m’en garantiriez tous deux, et si rien ne réussissait, j’aimerais encore mieux souffrir que de trahir mes devoirs.

— Ah ! dit Thuringe avec l’expression du plus tendre amour, je fais le serment à vos genoux de périr mille fois plutôt que de vous voir exposée à de nouveaux malheurs ! Ce serait moi qui vous vengerais alors.

— Loin de vous cette affreuse idée, s’écria Mme de Saxe ; légitime peut-être dans tout autre cas, elle deviendrait criminelle dans celui-ci.

— Je respecterai ses jours s’il protège les vôtres, je les détruis s’il vous outrage.

Enfin, après mille preuves d’un amour également senti de part et d’autre, les deux amis prièrent Adélaïde de leur raconter l’histoire de ses voyages. Elle le fit ; et lorsqu’elle en fut à la rencontre qu’elle avait fait du père de Kaunitz :

— Avouez, dit-elle à Mersbourg, qu’il est bien étonnant que le jour où j’attendais Thuringe près de ma volière, ce soit le fils de ce bon vieillard qui l’ait remplacé et qui ait péri sous les poignards de la jalousie de mon époux ; c’est un bonheur, sans doute, mais en est-il moins extraordinaire ?…