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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK


naturelle a porté dans l’instant vers le lieu qu’on lui désignait. Un peu plus de confiance en moi, madame, eût prévenu tous ces malheurs ; mais vous n’en eûtes jamais, et voilà où de fausses craintes nous conduisent.

— Croyez-moi, mon cher comte, je ne mérite point ce reproche : ne serez-vous pas demain peut-être le seul ami qui me restera ?

— Ah ! persuadez-vous bien, madame, que je serai toujours le plus sincère !

En ce moment, la trompette sonne ; les hérauts font ranger les spectateurs. Mersbourg, nommé maréchal du camp, fait jurer aux princes que leur cause est juste et que leurs droits sont bons. Les armes se vérifient et le gant est jeté dans la lice où les témoins se trouvent déjà. Les barrières s’ouvrent ; les combattants paraissent ; ils prennent du champ.

Au signal convenu, tous deux montés sur leur palefroi, armés de leur lance, couverts de leur écu, fondent avec rapidité l’un sur l’autre. La victoire est longtemps indécise ; leurs écus étincellent du choc des lances dont ils se frappent mutuellement ; mais celle de Thuringe, fortement appuyée au défaut de l’armure de Frédéric, lui fait vider les arçons et le renverse au milieu de l’arène bientôt inondée de son sang.