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de faire aussitôt couler leur sang en dédommagement de celui qu’il a répandu pour eux. S’il ne veut pas se faire cette justice, ils le conjurent de leur permettre d’user au moins leurs jours à le servir sans gages[1]. Paul, aussi prudent au sein de l’infortune que bienfaisant dans la prospérité, mais dont le cœur endurci par l’excès de ses maux ne peut plus comme autrefois s’ouvrir au sentiment qui lui coûte aussi cher, ordonne au bûcheron et à sa fille de se retirer, et leur souhaite de jouir tous deux aussi longtemps qu’il leur sera possible d’un bienfait qui lui enlève pour toujours l’honneur et le repos. Les malheureux n’osèrent répliquer ; ils disparurent. Paul laissa de son vivant ses biens à ses plus proches héritiers, sous la seule charge d’une pension de mille écus qu’il fut manger dans une retraite impénétrable aux yeux des hommes, où il mou-

  1. « À le servir sans gages. » Il y avait « à son service ».