sépara, après quelques fêtes où se prodiguèrent les
plus tendres assurances d’une réconciliation sincère
dont personne ne fut la dupe. Au retour, les
princes s’arrêtèrent quelque temps à Melun, où la
reine les reçut avec la même hilarité qu’ils affichaient
tous. On sait qu’à cette époque elle eut
plusieurs entretiens secrets avec le duc de Bourgogne,
et ce fut aussi là que se renouèrent une
partie des anciens projets, dont nous verrons bientôt
l’exécution. Pour donner plus de force enfin,
et à cette apparence de réconciliation, et au prestige
trompeur dont il fallait l’environner, ainsi que
les princes ennemis avaient, d’après l’usage de ces
temps, partagé leurs chevaux et leurs lits, ils partagèrent,
dit-on, les faveurs d’Isabelle. Pour la
première fois de sa vie cette femme, dit Bois-Bourdon[1],
eut l’air de se refuser à cette dépravation ;
mais le duc Jean lui ayant persuadé que
l’intimité dans laquelle ce moment allait la mettre
avec le jeune duc d’Orléans lui dévoilerait ses plus
secrets sentiments, elle crut pouvoir tout vaincre
pour l’intérêt de la cause commune, et sa pudeur
fort chancelante s’immola sans remords à son ambition
très enracinée. Ainsi, cette femme incestueuse
et perfide osa serrer dans ses bras le fils
- ↑ 11e pièce du procès, fo 2.