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ISABELLE DE BAVIÈRE


se lisait plus d’orgueil que de cette sensibilité si douce et si entraînante dans les regards naïfs d’une jeune personne. Sa taille annonçait de l’élévation et de la souplesse, ses gestes étaient prononcés, sa démarche hardie, son organe un peu dur, sa parole brève. Beaucoup de hauteur dans le caractère, aucune trace de cette tendre humanité, apanage des belles âmes et qui, rapprochant les sujets du trône, les console de cette distance pénible où les a fait naître le sort. Déjà de l’insouciance pour la morale et pour la religion qui l’étaie ; une insurmontable aversion pour tout ce qui contrariait ses goûts ; de l’inflexibilité dans l’humeur ; de l’emportement dans les plaisirs ; un dangereux penchant à la vengeance, trouvant facilement des torts à ce qui l’entourait ; aussi facile à soupçonner qu’à punir, à produire des maux qu’à les envisager de sang-froid ; prouvant par de certains traits que quand l’amour enflammerait son cœur, elle ne s’abandonnerait qu’à ses emportements et n’y verrait qu’un but utile. À la fois avare et prodigue, désirant tout, envahissant tout, ne connaissant le prix de rien, ne chérissant véritablement qu’elle, sacrifiant tous les intérêts, même ceux de l’état, au sien propre ; flattée du rang où le sort la plaçait, non pour y faire le bien, mais pour y trouver l’impunité du