onze heures du matin, entre Coucy et Noyon,
dans un château situé au fond d’un bois, appartenant
à mon frère aîné ; la voiture entra dans la
cour, on m’ordonna d’y rester, jusqu’à ce que
les chevaux et les domestiques furent écartés ;
alors mon frère aîné vint me chercher. Suivez-moi,
me dit-il brutalement après m’avoir détachée…
J’obéis en tremblant… Dieu, quel est mon
effroi, en apercevant le lieu d’horreur qui va me
servir de retraite ! c’était une chambre basse,
sombre, humide et obscure, fermée de barreaux
de toutes parts et ne tirant un peu de jour que
par une fenêtre donnant sur un large fossé plein
d’eau. — Voilà votre habitation, mademoiselle,
me dirent mes frères, une fille qui déshonore sa
famille ne peut être bien qu’ici… Votre nourriture
sera proportionnée au reste du traitement,
voilà ce qu’on vous donnera, continuèrent-ils en
me montrant un morceau de pain tel que celui
qu’on donne à des animaux, et comme nous ne
voulons pas vous faire souffrir longtemps, que
d’un autre côté, nous voulons vous enlever tout
moyen de sortir d’ici, ces deux femmes, dirent-ils
en me montrant la vieille et une autre à peu
près pareille que nous avions trouvée dans le
château, ces deux femmes seront chargées de
vous saigner des deux bras autant de fois par
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HISTORIETTES, CONTES ET FABLIAUX