Page:Sade - Historiettes contes et fabliaux, 1926.djvu/39

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
LE REVENANT
21


jour à dîner chez une Mme Duplatz, femme de sa tournure et de sa société, lorsqu’au milieu d’une partie que l’on avait commencée en sortant de table, un laquais vint prier Mme Dallemand de passer dans une chambre voisine, attendu qu’une personne de sa connaissance demandait instamment à lui parler pour une affaire aussi pressée que conséquente ; madame Dallemand dit qu’on attende, qu’elle ne veut point déranger sa partie ; le laquais revient, et insiste tellement que la maîtresse de la maison est la première à presser Mme Dallemand d’aller voir ce qu’on lui veut. Elle sort et reconnaît Ménou. — Quelle affaire si pressée, lui dit-elle, peut vous engager à venir me troubler ainsi dans une maison où vous n’êtes point connu ? — Une très essentielle, madame, répond le courtier, et vous devez croire qu’il faut bien qu’elle soit de cette espèce, pour que j’aie obtenu de Dieu la permission de venir vous parler pour la dernière fois de ma vie… À ces paroles qui n’annonçaient pas un homme très en bon sens, Mme Dallemand se trouble et fixant son ami qu’elle n’avait pas vu depuis quelques jours, elle s’effraye encore plus en le voyant pâle et défiguré. — Qu’avez-vous, monsieur, lui dit-elle, quels sont les motifs et de l’état où je vous vois, et des choses sinistres que vous