Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/258

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bien ſûrement plus qu’ailleurs dans les plaiſirs de la lubricité, que cette céleſte Mere déſire qu’il ſoit notre ſeul mobile ; c’eſt un très-petit malheur que, pour l’accroiſſement de la volupté de l’homme, il lui faille ou négliger, ou troubler celle de la femme ; car ſi ce trouble lui fait gagner quelque choſe, ce que perd l’objet qui le ſert, ne le touche en rien, il doit lui être indifférent que cet objet ſoit heureux ou malheureux, pourvu que lui ſoit délecté ; il n’y a véritablement aucune ſorte de rapports entre cet objet & lui. Il ſerait donc fou de s’occuper des ſenſations de cet objet aux dépens des ſiennes ; abſolument imbécille, ſi pour modifier ces ſenſations étrangères il renonce à l’amélioration des ſiennes. Cela poſé, ſi l’individu dont il eſt queſtion, eſt malheureuſement organiſé de maniere à n’être ému qu’en produiſant, dans l’objet qui lui ſert, de douloureuſes ſenſations, vous avouerez qu’il doit s’y livrer ſans remords, puiſqu’il eſt là pour jouir, abſtraction faite de tout ce qui peut en réſulter pour cet objet… Nous y reviendrons : continuons de marcher par ordre.

Les jouiſſances iſolées ont donc des charmes, elles peuvent donc en avoir plus que toutes autres ; eh ! s’il n’en était pas ainſi, comment jouiraient tant de vieillards, tant de gens ou contrefaits ou pleins de défauts ; ils ſont bien sûrs qu’on ne les aime pas ; bien certains qu’il eſt