Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/261

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nous flatte le plus, ou qu’en voyant éprouver à cet objet la plus forte ſenſation poſſible ; or, il n’eſt aucune ſorte de ſenſation qui ſoit plus vive que celle de la douleur ; ſes impreſſions ſont ſûres, elles ne trompent point comme celles du plaiſir, perpétuellement jouées par les femmes & preſque jamais reſſenties par elles ; que d’amour-propre d’ailleurs, que de jeuneſſe, de force, de ſanté ne faut-il pas pour être ſûr de produire dans une femme cette douteuſe & peu ſatisfaiſante impreſſion du plaiſir. Celle de la douleur au contraire, n’exige pas la moindre choſe : plus un homme a de défauts, plus il eſt vieux, moins il eſt aimable, mieux il réuſſira. À l’égard du but, il ſera bien plus ſûrement atteint puiſque nous établiſſons qu’on ne le touche, je veux dire, qu’on n’irrite jamais mieux ſes ſens que lorſqu’on a produit dans l’objet qui nous ſert la plus grande impreſſion poſſible, n’importe par quelle voie ; celui qui fera donc naître dans une femme l’impreſſion la plus tumultueuſe, celui qui bouleverſera le mieux toute l’organiſation de cette femme, aura décidément réuſſi à ſe procurer la plus grande doſe de volupté poſſible, parce que le choc réſultatif des impreſſions des autres ſur nous, devant être en raiſon de l’impreſſion produite, ſera néceſſairement plus actif, ſi cette impreſſion des autres a été pénible, que ſi elle n’a été que douce ou moëleuſe ; d’après cela,

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