Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/269

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comme ces écrivains pervers, dont la corruption eſt ſi dangereuſe, ſi active qu’ils n’ont pour but en imprimant leurs affreux ſyſtêmes, que d’étendre au-delà de leur vie la ſomme de leurs crimes ; ils n’en peuvent plus faire, mais leurs maudits écrits en feront commettre, & cette douce idée qu’ils emportent au tombeau les conſole de l’obligation, où les met la mort de renoncer au mal. — Les monſtres, m’écriai-je !… Armande qui était une créature fort-douce me baiſa en verſant quelques larmes, puis ſe remit à battre l’eſtrade autour du lit de ce roué.

Au bout de deux heures, le Moine ſe réveilla effectivement, dans une prodigieuſe agitation, & me prit avec tant de force que je crus qu’il allait m’étouffer ; ſa reſpiration était vive & preſſée ; ſes yeux étincellaient, il prononçait des paroles ſans ſuite, qui n’étaient autres que des blaſphêmes ou des mots de libertinage ; il appelle Armande, il lui demande des verges, & recommence à nous fuſtiger toutes deux, mais d’une maniere encore plus vigoureuſe qu’il ne l’avait fait avant de s’endormir. C’eſt par moi qu’il a l’air de vouloir terminer ; je jette les hauts cris ; pour abréger mes peines, Armande l’excite violemment, il s’égare, & le monſtre à la fin décidé par les plus violentes ſenſations perd avec les flots embraſés de ſa ſemence & ſon ardeur & ſes déſirs.