Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/460

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— Conſtatés ou non, dit Cardoville en ſe levant & venant effrontément me parler ſous le nez, tu ſeras brûlée p… ſi par une entiere réſignation, par une obéiſſance aveugle, tu ne te prêtes à l’inſtant à tout ce que nous allons exiger de toi. — Encore des horreurs, m’écriai-je ; eh quoi ! ce ne ſera donc qu’en cédant à des infamies, que l’innocence pourra triompher des piéges que lui tendent les méchans ! — Cela eſt dans l’ordre, reprit Saint-Florent ; il faut que le plus faible céde aux déſirs du plus fort, ou qu’il ſoit victime de ſa méchanceté : c’eſt votre hiſtoire, Théreſe, obéiſſez donc, & en même temps ce libertin retrouſſa leſtement mes jupes. Je me reculai, je le repouſſai avec horreur, mais étant tombée par mon mouvement dans les bras de Cardoville, celui-ci s’emparant de mes mains, m’expoſa dès-lors ſans défenſe aux attentats de ſon confrere. On coupa les rubans de mes jupes, on déchira mon corſet, mon mouchoir de cou, ma chemiſe, & dans l’inſtant je me trouvai ſous les yeux de ces monſtres auſſi nue qu’en arrivant au monde. — De la réſiſtance, diſoient-ils l’un & l’autre en procédant à me dépouiller… de la réſiſtance… cette catin imagine pouvoir nous réſiſter… & pas un vêtement ne s’arrachait qu’il ne fût ſuivi de quelques coups.

Dès que je fus dans l’état qu’ils voulaient, aſſis tous deux ſur des fauteuils ceintrés, & qui s’ac-