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LA MARQUISE DE GANGE

son ordinaire, sans parler de rien, il ne repartit que le lendemain après dîner. Etant arrivé, il alla voir sa femme qui le reçut avec tendresse ; ce qui l’enhardit à lui demander qu’elle révoquât la déclaration qui confirmoit son testament d’Avignon : mais elle le refusa constamment. Il ne lui en parla plus, et lui rendit des soins, suivant le personnage qu’il devoit faire. Elle demanda les sacremens. Le vicaire Perrette étant venu pour l’administrer, elle exigea qu’il prit la moitié de l’hostie, craignant encore le poison de sa part : il la prit.

Le parlement de Toulouse envoya M. Catalan, Conseiller, pour interroger madame de Ganges. Le lendemain de son interrogatoire, qui étoit le dix-neuvième jour de son assassinat, elle mourut, non de ses blessures, mais de l’effet du poison qui lui avoit brûlé les entrailles, et noirci le cerveau.

Immédiatement après sa mort, M. Catelan ayant fait décréter le marquis de prise de corps, il fut arrêté dans son château, et conduit en prison à Montpellier.

Madame de Rossan, mère de la marquise, devint sa partie déclarée ; et ne respirant que vengeance, elle se mit en possession de tous les biens de sa fille, suivant le premier testament.

Après deux interrogatoires le marquis fut conduit dans les prisons du parlement de Toulouse. Madame de Rossan publia un monitoire contre lui, comme complice : il y répondit. On voyoit bien qu’il étoit coupable : mais les preuves étoient trop faibles pour le condamner au dernier supplice.