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Page:Sade - La marquise de Gange, Pauvert, 1964.djvu/96

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LA MARQUISE DE GANGE

ce château, je n’ai pas plus de motifs que vous qui puissent élever en moi des soupçons. — En ce cas, je dois donc tout attendre du temps. — C’est le seul parti raisonnable. — Ah ! qu’ils seront longs pour moi, les jours où je ne pourrai plus l’appeler mon ami, où je ne lirai plus dans ses yeux les sentiments si doux qui les animaient autrefois ! — Approuveriez-vous, Euphrasie, que je lui fisse quelques questions sur ce changement qui vous alarme, et qui, peut-être, n’existe que dans votre imagination trop ardente ? — Gardez-vous-en, répondit la marquise, je ne veux même pas qu’il soupçonne mes pleurs… S’il allait ne pas les essuyer !…

— Oh ! femme trop sensible et trop délicate, dit madame de Roquefeuille, ne le croyez pas assez barbare pour cela : Alphonse vous aime ; il n’est occupé que de vous ; vos alarmes n’ont d’existence que dans votre extrême susceptibilité, et je ferais votre malheur si je vous conseillais d’être moins sensible. Avez-vous confié vos peines à d’autres personnes ? Et ici madame de Gange convint de sa conversation avec le père Eusèbe, et rendit à madame de Roquefeuille une partie des conseils et des consolations qu’elle en avait reçus. — Eusèbe est un honnête homme, répondit madame de Roquefeuille ; j’approuve tout ce qu’il vous a dit, et vous exhorte à le mettre en pratique ; mais malheureusement nous ne le