Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/270

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reusement Jeannette est soupçonnée, on la questionne, elle se coupe ; et la seule chose qu’elle a la prudence de taire, est le lieu de la retraite de celle qui l’envoie. Eh bien ! gardez votre secret, dit Bressac, mais en quelque lieu que soit cette coquine, remettez-lui cette lettre, et dites-lui de prendre garde à elle. Jeannette effrayée revient en hâte, et voici la lettre qu’elle rend à Justine.

« Une scélérate, capable d’avoir assassiné ma mère, est bien hardie de renvoyer dans le même lieu où son crime s’est exécuté ! Ce qu’elle peut faire de plus sage, est de cacher avec soin le lieu de sa retraite ; elle peut être sûre qu’on l’y troublera, si on l’y découvre ; qu’elle s’abstienne d’une seconde mission ; on lui déclare qu’on ferait arrêter son ambassadrice. Au reste, il est bon qu’elle sache que l’affaire de la Conciergerie qu’elle a cru terminée, ne l’est point ; le décret n’a pas été purgé. On la laissait ainsi sous le glaive, pour voir comment elle se conduirait, avec le projet de ne s’intéresser à elle, qu’au cas qu’elle en fût digne : qu’elle juge donc, d’après l’état où elle est, de quel poids doit être en justice la seconde accusation bien plus grave qui vient d’être dirigée contre elle ».