Aller au contenu

Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

il m’avait foutue onze coups dans une soirée oh ! pour le quatrième, tu m’avoueras que c’est un ange ; il est trop beau pour faire ce métier, vingt-un ans ; nous l’appelons le Roué, et il le sera ; avec les dispositions qu’il a pour le crime, un tel sort ne peut lui manquer ; mais c’est son vit, Justine, c’est son vit qu’il faut que tu voies ; on ne se fait pas d’idée d’un engin de cette espèce ; vois comme c’est long, comme c’est gros, comme c’est dur ; cette tête comme elle est vermeille ! Vas, je t’assure que quand j’ai cela dans mes entrailles, je me crois mieux foutue que ne le fût jamais Messaline ; mais, sais-tu, ma fille, qu’il y a dix mille femmes à Paris, qui donneraient la moitié de leur or ou de leurs bijoux, pour être à ta place. Ecoute, ajouta-t-elle pourtant, après un peu de réflexion : j’ai assez d’empire sur ces drôles-là pour obtenir ta grâce, aux conditions que tu t’en rendras digne. — Hélas ! madame, que faut-il faire ; ordonnez-moi, je suis toute prête ? — Nous suivre, tuer, voler, empoisonner, massacrer, incendier, piller, ravager comme nous ; à ce prix, je te sauve le reste ; ici Justine ne crut pas devoir balancer. En acceptant cette cruelle condition, elle courait, il est