Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/19

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de tout genre, te les cache, sans doute ; je t’en donnerai, mais service pour service, Charlotte ; songe, que tu n’auras ce que je te promets qu’au prix des trésors de ton mari : à combien montent ces trésors ? — Quatre-vingt millions, tout au plus. — En quelles espèces ? — Des lingots, des piastres, des onces et des sequins. — Comment ferons-nous ? — Tu vois cette croisée, me dit Charlotte, en me montrant une fenêtre assez voisine de celle où nous nous plaçâmes, qu’un charriot bien attelé se trouve au bas après-demain ; je volerai la clef, je jetterai par la fenêtre dans ce charriot tout ce que je pourrai. — Et la garde ? — Il n’y en a point de ce côté. Écoute, dis-je à Charlotte dont je complottais la perte avec délices dans ce moment-là : j’ai quelques démarches à faire pour préparer le poison qu’il te faut et ne me soucie pas de les entreprendre sans être sure de mon fait ; signe-moi cet écrit, dis-je en le minutant tout de suite, j’agirai dès-lors sans nulle crainte, et nous serons tranquilles toutes deux. Charlotte, aveuglée par son amour pour moi, par l’extrême desir de se défaire de son mari, en signant tout ce que je voulus, me prouva que la