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imagination romanesque lui faisait constamment espérer le bonheur.

Elle avait fait environ deux lieues ; la chaleur commençant à l’incommoder, elle monte sur une petite éminence couverte d’un bouquet de bois peu éloigné de la route, avec le dessein de s’y rafraîchir et d’y sommeiller un couple d’heures à moins de frais que dans une auberge, et plus en sûreté qu’au bord du grand chemin ; elle s’établit au pied d’un chêne, et après un déjeûner frugal, elle se livre aux douceurs du sommeil. L’infortunée en avait joui avec assez de calme, lorsque ses yeux, se r’ouvrant à la lumière, elle se plut à considérer le paysage agréable qui se dessinait devant elle ; du milieu d’une forêt qui s’étendait vers la droite, elle crut appercevoir dans le lointain un petit clocher s’élever modestement vers les nues. Aimable solitude, se dit-elle, que ton séjour me fait envie ! tu dois être la demeure de quelques douces et vertueuses récluses qui ne s’occupent que de Dieu… que de leurs devoirs, ou peut-être, ô solitude heureuse ! tu sers d’asyle à quelques saints hermites uniquement consacrés à la religion, éloignés de cette société pernicieuse où le crime veillant sans cesse autour de l’in-