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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/99

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horrible inceste ; et les terribles revers de ma naissance ont été cause de tous ceux de ma vie ; jusqu’à onze ans je n’ai vécu que de charités ; une dame me prit à cet âge, m’apprit à travailler ; et je ne serais pas dans l’affreuse position où vous me voyez, si je n’avais eu le malheur de la perdre. L’ouvrage m’a manqué depuis, et j’ai mieux aimé demander mon pain, que de me jeter dans le libertinage. Soyez généreux, monsieur ; soulagez-moi, sans abuser de mon état, et vous serez couvert des bénédictions du ciel et des miennes. Hélène baissa les yeux après ce discours, sans se douter du désordre étonnant qu’elle venait de porter dans toutes les parties de mon organisation. Il m’était impossible de ne pas reconnaître, dans cette charmante créature, l’enfant que j’avais eu de ma cousine Henriette… de cette victime infortunée de la scélératesse de mon cousin Alexandre, et de mon affreuse méchanceté… Jamais aucune fille ne ressembla davantage à sa mère ; Hélène n’eut pas dit un mot, qu’il ne m’en eût pas moins été facile de me rappeler sa naissance, rien qu’en l’examinant. Mon enfant, dis-je, vos récits sont pleins d’intérêt, peut-être doivent-ils me toucher plus qu’un