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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 4, 1797.djvu/136

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d’envie de m’instruire. Cette intempérance pouvait être tolérée par l’âge de ma mère qui ayant mis mon frère au monde à treize ans, en avait à peine vingt-trois. Pleine d’ardeur, et jolie comme un ange, la coquine, excusée par la nature, en écoutait infiniment plus la voix que celle de la raison. Il m’avait été facile de voir aux conseils que je recevais d’elle que sa morale était fort relâchée. Mais, n’ayant pas encore assez d’esprit pour interprêter ses motifs, je prenais pour de la tendresse, ce qui n’était l’effet que de la plus complète corruption.

Tels étaient à-peu-près les motifs pour lesquels notre éducation se négligeait : lire et écrire était à-peu-près tout ce qu’on nous enseignait, mais point de talens… point de morale… point de religion. Siméon, le plus impie, le plus libertin de tous les hommes, avait expressément défendu que l’on nous entretînt jamais de Dieu. Il serait à souhaiter, disait-il, qu’on eut égorgé le premier qui put en prononcer le nom. Préservons la jeunesse de ces dangereuses connaissances, ce seront autant d’êtres échappés à l’erreur ; puissent tous les pères agir de même, et la philosophie plânerait bientôt sur les hommes.