Aller au contenu

Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 4, 1797.djvu/235

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

point sur tes décrets ; ils doivent être, je le sais, incompréhensibles comme toi ; mais, de quel crime suis-je donc coupable pour être traitée comme je la suis ? n’importe, tu le veux, je m’y soumets ; que ta volonté s’accomplisse ; j’étais peut-être un instrument du crime que ta justice veut briser. Je t’abandonne, ô mon Dieu, ce corps épuisé par la douleur, et qu’ont si long-tems desséché les larmes de la misère et du désespoir ; mais laisses revoler vers toi cette ame aussi pure, que quand il te plut de me la donner, et que tes bras consolateurs s’ouvrent au moins pour y recevoir une malheureuse qui n’a jamais vécu que pour toi ».

Justine n’était éclairée que d’une lampe funèbre ; elle profite du moment où brûle ce fatal luminaire pour se débarrasser de ses fers : les corps entre lesquels on l’avait liée ne vivant plus, elle eut moins de peine à se dégager ; elle y réussit à la fin ; son premier mouvement est d’en rendre grâces à l’Être-Suprême ; elle jette ensuite un œil d’horreur sur ce qui l’environne ; il lui est impossible de compter les cadavres dont est couvert le sol impur de ce lieu d’horreur ; elle y croit reconnaître pourtant ceux des femmes qui l’ont précédées ; il paraissait que la dernière qu’on