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on voit que c’est à leur corps que ses discours s’adressent ; jamais il n’en sépare l’ame[1]. Mais ce n’est point à chercher l’origine de cette fable hideuse que je dois m’attacher ici ; vous en démontrer toute la folie, devient l’unique objet de mon travail.

Parlons d’abord un instant, mes amis, des causes qui purent la produire. Les malheurs du monde, les bouleversemens qu’il éprouva, les phénomènes de la nature, furent incontestablement les premières ; la physique mal connue, mal interprétée dut autoriser les secondes ; la politique devint la troisième. L’impuissance où est l’entendement humain, par rapport à la faculté de se connaître lui-même, vient moins de l’inexplicabilité de l’énigme, que de la manière dont elle est proposée. D’anciens préjugés ont prévenu l’homme contre sa propre nature ; il veut être ce qu’il n’est pas ; il s’épuise en efforts pour se trou-

  1. « Si votre bras, dit quelque part cet insolent baladin, vous est un objet de scandale, coupez-le, et jetez-le loin de vous ; car, il vaut mieux entrer dans le royaume des cieux avec un bras de moins, que d’être précipité tout entier dans l’enfer. » Est-il rien de plus matérialiste que ce propos ?