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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 5, 1797.djvu/225

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priété, on arrive nécessairement à l’usurpation. Cependant le vol n’est puni que parce qu’il attaque le droit de propriété ; mais ce droit n’est lui-même originairement qu’un vol ; donc la loi punit le vol de ce qu’il attaque le vol, le faible de ce qu’il cherche à rentrer dans ses droits, et le fort de ce qu’il veut ou établir ou augmenter les siens en profitant de ce qu’il a reçu de la nature. Peut-il exister au monde une plus affreuse conséquence ! Tant qu’il n’y aura aucune propriété légitimement établie (et il ne saurait y en avoir aucune), il sera très-difficile de prouver que le vol soit un crime, car ce que le vol dérange d’un côté, il le rétablit à l’instant de l’autre, et la nature ne s’intéressant pas plus au premier de ces côtés qu’au second, il est parfaitement impossible qu’on puisse constater l’offense à ses loix, en favorisant l’un de ces côtés plus que l’autre.

Le faible a donc raison, quand cherchant à rentrer dans des possessions usurpées, il attaque à dessein le fort, et l’oblige à restitution ; le seul tort qu’il puisse avoir, c’est de sortir du caractère de faiblesse que lui imprimât la nature : elle le créât pour être esclave et pauvre, il ne veut pas s’y soumettre,