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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 5, 1797.djvu/34

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bonheur de notre vie, ce serait devenir soi-même son bourreau, que de les vouloir réprimer, mais elle consiste à s’y livrer avec un tel mystère, avec des précautions si étendues, qu’on ne puisse jamais être surpris. Qu’on ne craigne point par-là d’en diminuer les délices ; le mystère ajoute au plaisir. Une telle conduite d’ailleurs, assure l’impunité, et l’impunité n’est-elle pas le plus délicieux aliment des débauches ?

Après t’avoir appris à régler le remords né de la douleur d’avoir fait le mal trop à découvert, il est essentiel, ma chère amie, que je t’indique à présent la manière d’éteindre totalement en soi cette voix confuse qui, dans le calme des passions, vient encore quelquefois réclamer contre les égaremens où elles nous ont portés ; or, cette manière est aussi sûre que douce, puisqu’elle ne consiste qu’à renouveller si souvent ce qui nous a donné des remords, que l’habitude ou de commettre cette action ou de la combiner énerve entièrement toute possibilité d’en pouvoir former des regrets. Cette habitude, en anéantissant le préjugé, en contraignant notre ame à se mouvoir souvent de la manière et dans la situation qui pri-