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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 7, 1797.djvu/334

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toises de profondeur, où nous dirigeait notre marche. Toute cette partie était enveloppée de bois si touffus, si prodigieusement épais, qu’à peine y voyait-on pour se conduire : après avoir descendu à pic, pendant près de trois heures, nous arrivâmes au bord d’un vaste étang ; sur une île située au milieu de cette eau, se voyait le donjon du palais qui servait de retraite à notre guide ; la hauteur des murailles, qui l’entouraient était cause qu’on n’en pouvait distinguer que le toit : il y avait six heures que nous marchions sans avoir rencontré la moindre maison…… pas un individu ne s’était offert à nos regards : une barque noire comme les gondoles de Venise nous attendait au bord de l’étang ; ce fut de-là où nous pûmes considérer l’affreux bassin dans lequel nous étions : il était environné, de toutes parts, de montagnes à perte de vue, dont les sommets et les flancs arides étaient couverts de pins, de melezes et de chênes verds : il était impossible de rien voir de plus agreste et de plus sombre ; on se croyait au bout de l’univers : nous montâmes dans la barque ; le géant la conduisit seul. Du port au château, il y avait encore trois cents toises : nous arrivâmes au