Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 8, 1797.djvu/100

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Aglaé, ce n’est plus que de l’horreur et de la vengeance, que vous devez à un tel monstre ; vous seriez à jamais méprisable, si vous dévoriez une telle injure ; quelle sûreté d’ailleurs y aurait-il pour vous ? demain vous êtes la victime de votre mère, si elle n’est pas la vôtre aujourd’hui. Fille trop aveuglée, rougis-tu donc de verser un sang aussi criminel ; peux-tu soupçonner encore l’existence de quelques liens entre cette scélérate et toi ? — Vous étiez son amie ? — Puis-je l’être aussitôt qu’elle proscrit les jours de tout ce que j’aime au monde. — Vous avez des goûts… des passions comme elle. — Oui, mais je n’ai pas, comme elle, le crime en vénération ; je ne suis pas, comme elle, une louve affamée de sang ; j’abhorre la cruauté ; j’aime mes semblables, et le meurtre est une infamie qui me fait horreur. Cesse, Aglaé, cesse des comparaisons qui ne servent à rien, qui me déshonorent, et qui nous font perdre des instans précieux. Ce ne sont pas des paroles qu’il nous faut, ce sont des actions. — Qui ? moi plonger le poignard dans le sein d’une mère ! — Tu ne dois plus la considérer comme telle, dès qu’elle a comploté contre toi ;