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ce n’est que sur la route de la fortune qu’on peut se permettre la moisson des plaisirs ; il faut les oublier jusques-là.

Aussi ambitieuse que Sbrigani, adorant l’or autant que lui, je ne pensais pourtant pas absolument de même sur les motifs ; le goût du crime s’annonçait avant tout chez moi, et je songeais bien plus à dérober de l’or, pour me procurer le plaisir du vol, qu’à le prodiguer en jouissances.

J’arrive au rendez-vous, parée de tout ce que l’art pouvait ajouter aux charmes que m’avait prêtés la nature ; il était, j’ose le dire, impossible d’être plus belle et plus élégante.

Si je ne craignais d’interrompre mes récits, je vous devrais sans doute une description de cette campagne enchanteresse, que l’on vient voir des extrémités de l’Europe, et qui peut-être est le lieu de Rome qui renferme le plus d’antiques précieux. Il faudrait que je vous peignisse ces jardins en terrasses, les plus frais, les mieux ornés, les plus agréablement dessinés de toute l’Italie ; mais moins empressée de vous tracer des détails, que de vous transmettre des faits, je passerai de suite aux événements,