Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 9, 1797.djvu/104

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phie. — Oh ! mon amie, je rends graces au sort qui me l’a fait quiter pour toi ; souvenons-nous de la foi des Bohèmes, que nos aiguillons piquent tous les autres, mais qu’ils ne se tournent jamais contre nous. Quelque jolie que fut Emma, quelque ressemblance qu’il y eût de son caractère au mien, je n’étais pas encore assez sûr de moi, pour lui répondre d’une balance exacte dans l’association qu’elle desirait, et je lui laissai interpréter, comme elle le voulut, mon profond silence, Était-il donc un crime au monde que je pusse m’engager à ne pas commettre ?

Cependant notre liaison se cimenta, nos arrangemens se prirent ; leur première base fut la promesse inviolable et mutuelle de ne jamais manquer l’occasion de mal faire, de la faire naître, autant que cela dépendrait de nous, et que le fruit de nos vols communs ou de nos rapines, se partagerait toujours.

Nous n’avions pas fait vingt lieues, qu’une occasion se présentât de mettre en action, et nos maximes et nos sermens. Nous traversions la Gothie, et nous nous trouvions aux environs de Jocopingk, lorsqu’une voiture française qui courait devant nous, se brisa