Page:Sade - Les Crimes de l’amour, 1881.djvu/38

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Furieuse, elle vole chez le duc de Guise.

— Monsieur, lui dit-elle fièrement, j’imaginais que la grandeur et la noblesse de l’âme devaient guider dans toutes les actions, ceux sur qui l’état se repose du soin de le conduire, et que les ressorts d’un gouvernement, en un mot, ne se confiaient qu’aux mains de la vertu. Mon père m’envoie vers vous pour négocier sa justification ; non-seulement vous me fermez les avenues du trône, non-seulement vous empêchez que je ne puisse me faire entendre, mais vous profitez même de cet instant pour plonger mon malheureux père dans une affreuse prison.

Ah ! monsieur le duc, ceux qui, comme lui, ont versé près de vous leur sang pour la patrie, me paraissaient mériter plus d’égards ; ainsi donc pour éluder ma première demande, vous me contraignez d’en faire une seconde, et vous me précipitez dans de nouveaux malheurs, pour éteindre en moi le souvenir des premiers ?… Ah ! monsieur, la rigueur, toujours voisine de l’injustice et de la cruauté, énerve les âmes, leur enlève l’énergie qu’elles ont reçue de la nature, par conséquent le goût des vertus ; et l’état alors, au lieu de la