Page:Sade - Les Crimes de l’amour, 1881.djvu/67

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mieux renoncer au bonheur de sa vie, que de m’obtenir aux dépends de la vôtre…. Mais quoi ! partagerais-je les torts du duc de Guise, si je ne faisais que consentir à devenir son épouse, en le laissant se charger seul des forfaits qui doivent me lier à lui ? Au moins vous vivriez, mon père ; j’aurais conservé vos jours, je serais l’appui de votre vieillesse, j’en pourrais faire le bonheur.

— Et j’achèterais quelques moments de vie par une multitude de crimes ?

— Ce ne seront pas les vôtres.

— N’est-ce pas les partager que d’y donner lieu ? Non, ne l’espère pas, ma fille ; je ne souffrirai pas qu’Anne d’Est soit immolée pour moi ; il faut que l’un des deux périsse ; le duc de Guise ne répudiera point sa femme ; il ne sera à toi qu’en tranchant les jours de cette vertueuse princesse. Voudrais-tu devenir l’épouse d’un tel homme, d’un barbare qui, non content de ce crime, remplit chaque jour la France de deuil et de larmes ?…. Dis, Juliette, dis, pourrais-tu goûter un instant de tranquillité dans les bras d’un tel monstre ?….. Et cette vie, qui t’aurait coûté si cher…. ô ! mon enfant,