Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 1, 1799.djvu/39

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ficile de remplir cette tâche sans donner des armes contre moi ; ne deviens-je pas doublement coupable de n’avoir pas bien fait, si je prouve que je sais ce qu’il faut pour faire bien. Ah ! laissons ces vaines considérations, qu’elles s’immolent à l’amour de l’art.

La connaissance la plus essentielle qu’il exige est bien certainement celle du cœur de l’homme. Or, cette connaissance importante, tous les bons esprits nous approuveront sans doute en affirmant qu’on ne l’acquiert que par des malheurs et par des voyages ; il faut avoir vu des hommes de toutes les nations pour les bien connaître, et il faut avoir été leur victime pour savoir les apprécier ; la main de l’infortune, en exaltant le caractère de celui qu’elle écrase, le met à la juste distance où il faut qu’il soit pour étudier les hommes, il les voit de là, comme le passager apperçoit les flots en fureur se briser contre l’écueil sur lequel l’a jeté la tempête ; mais dans quel-