Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 2, 1799.djvu/37

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amollit mon cœur ; es-tu donc un ange céleste ? ou n’es-tu qu’une créature humaine, parle, qui es-tu ? Je ne me connais plus, je ne sais plus ni ce que je veux, ni ce que je fais ; toutes mes facultés anéanties dans toi-même, ne me laissent plus former que tes vœux… Levez-vous, miss, levez-vous, c’est à moi de tomber aux pieds du dieu qui m’enchaîne ; levez-vous, votre empire est trop bien établi, il devient impossible… absolument impossible qu’aucun desir impur puisse l’ébranler dans mon âme… et lui rendant son mouchoir, tenez, cachez-moi ces charmes qui m’enivrent ; je n’ai besoin d’augmenter par rien le délire où tant d’attraits viennent de me plonger. Homme sublime, s’écria Henriette en pressant une des mains du lord, que ne méritez-vous pas pour une aussi généreuse action ? — Ce que je veux mériter, miss, c’est votre cœur, voilà le seul prix où j’aspire ; voilà le seul triomphe qui soit digne de moi. Rappellez-vous éternellement que je fus maître de votre personne, et que je n’en abusai pas…