Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/170

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tôt remarqué notre belle héroïne, qu’il conçut aussi-tôt le perfide dessein de la séduire ; il dansa beaucoup avec elle, se plaça près d’elle au souper, et témoigna si clairement enfin les sentimens qu’elle lui inspirait, que toute la ville ne douta plus qu’elle ne devint bientôt ou la femme, ou la maîtresse d’Oxtiern.

On ne rend point la cruelle situation d’Herman pendant que toutes ces choses se passaient ; il avait été au bal ; mais voyant sa maîtresse dans une faveur si éclatante, lui avait-il été possible d’oser même un instant l’aborder ? Ernestine n’avait assurément point changé pour Herman, mais une jeune fille peut-elle se défendre de l’orgueil ? Peut-elle ne pas s’énivrer un instant des hommages publics, et cette vanité que l’on caresse en elle, en lui prouvant qu’elle peut être adorée de tous, n’affaiblit-elle pas le desir qu’elle avait avant, de n’être sensible qu’aux flatteries d’un seul ? Ernestine vit bien qu’Herman était inquiet ; mais Oxtiern était à son char, toute l’assemblée la louait, et l’orgueil-