Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/242

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’on immolait une de ses victimes… le scélérat flétrissait l’autre. Sanders se levant ici avec fureur, c’en est assez, dit-il, je sais mon devoir ; le fils du brave ami de Charles XII n’a pas besoin qu’on lui apprenne comment il faut se venger d’un traître ; dans une heure, je serai mort, ma fille, où tu seras satisfaite. Non, mon père, non, dit Ernestine, en empêchant le colonel de sortir, j’exige, au nom de tout ce qui peut vous être le plus cher, que vous n’embrassiez pas vous-même cette vengeance ; si j’avais le malheur de vous perdre, pensez-vous à l’horreur de mon sort ? restée seule sans appui… aux mains perfides de ces monstres, croyez-vous qu’ils ne m’auraient pas bientôt immolée ?… Vivez donc pour moi, mon père, pour votre chère fille, qui dans l’excès de sa douleur, n’a plus que vous pour secours et pour consolation… n’a plus que vos mains dans le monde qui puissent essuyer ses larmes… Écoutez mon projet ; il s’agit ici d’un léger sacrifice, qui peut-être même deviendra superflu, si mon