Page:Sade - Philosophie dans le boudoir, Tome I, 1795.djvu/103

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 93 )


que la distance qu’ils exigeront eux-mêmes. Quoiqu’il en soit, ma chère, tu gagnas donc ta liberté par l’acquiescement à cette complaisance ?

Madame de Saint-Ange.

La plus entière, Eugénie, je fis de mon côté tout ce que je voulus, sans qu’il y mît d’obstacles, mais je ne pris point d’amant ; j’aimais trop le plaisir pour cela, malheur à la femme qui s’attache, il ne faut qu’un amant pour la perdre, tandis que dix scènes de libertinage, répétées chaque jour, si elle le veut, s’évanouiront dans la nuit du silence aussitôt qu’elles seront consommées. J’étais riche, je payais des jeunes gens qui me foutaient sans me connaître ; je m’entourrais de valets charmans sûrs de goûter les plus doux plaisirs avec moi s’ils étaient discrets, certains d’être renvoyés s’ils disaient un mot. Tu n’as pas d’idée, cher ange, du torrent de délices dans lequel je me suis plongée de cette manière. Voilà la conduite que je prescrirai toujours à toutes les femmes qui voudront m’imiter, depuis douze ans que je suis mariée, j’ai